2.4 La vie au fil des temps
Livre en vente aux Editions Nestor: → Ici
Après « D’une vie à l’autre » et « La vie en face« , avec ce roman d’anticipation je boucle ma trilogie. En partant de nos réalités économiques, sociales et environnementales, j’imagine un scénario d’avenir pour la Guadeloupe dans les années 2030. Une fiction que je situe à une période ni trop proche pour ne pas se dissoudre dans nos joutes politiques, ni trop lointaine pour ne pas nous laisser indifférent.
C’est une période troublée où la France, elle-même, confrontée à des crises multiples et sans précédent, délaisse ses filles d’outre-mer, au moment où celles-ci font face à des évènements naturels d’ampleur. A quatre-vingt ans passés, après un mystérieux et édifiant voyage dans le futur à des centaines d’années de son époque, Taali va reprendre son bâton de pèlerin pour guider la communauté de Kôlbo à travers les débris d’un monde qui s’effondre. Il s’agit d’un pèlerinage sur la voie de son propre destin. Dans le même temps le patriarche arrive au bout de sa quête.
L’ouvrage comprend 3 parties:
Première partie
Har-Maguédôn
Contexte
Nous sommes dans les années 2030, la Guadeloupe connait des moments difficiles dans un contexte de crise mondiale, qui voit le déclin des anciennes puissances dont l’Europe et naturellement la France à laquelle l’île est toujours politiquement attachée.
L’histoire
D’un côté, Quentin un franco-haïtien et Amiya une ravissante petite indienne vont se rencontrer fortuitement sur une ancienne propriété, où réside une population complexe composée de plusieurs communautés vivant les unes à côté des autres. Sur un fond de crise économique et de crise sociétale va naître un amour impossible, qui tentera de poursuivre malgré-tout son chemin en défiant les réflexes ethniques.
D’un autre côté, Eliad un petit délinquant et Dorlith une « négropolitaine » que la crise a ramenée en Guadeloupe vont se rencontrer au cours d’une soirée entre jeunes. Elle légèrement plus âgée que lui mais beaucoup plus futée voit la possibilité de gagner beaucoup d’argent en exploitant au maximum les possibilités qu’offre cette société à la dérive. Pour cela elle va pousser Eliad à gravir des échelons dans le petit banditisme jusqu’au jour où il va rencontrer un plus gradé que lui.
Les routes de Quentin et d’Eliad se croisent dans une prison où un violent tremblement de terre scelle leur union, et leur assigne un nouveau rôle dans un pays en quête d’acteurs pour lui jouer un avenir.
Extrait
A Jarry, le sol s’était liquéfié par endroits, emportant les constructions qui s’y trouvaient. C’est ce qui s’était produit à l’annexe de la prison. La cellule dans laquelle se trouvaient Quentin et Eliad était en sous-sol ce qui dans un premier temps les avait mis à l’abri des dégâts de surface. Dans le petit cachot, un calme troublant avait succédé à l’épouvantable fracas qui avait duré une parcelle d’éternité. Quentin fut le premier à redonner signe de vie en appelant Eliad. Celui-ci, à l’appel de son nom, émergea péniblement du fond ténébreux dans lequel se diluait sa conscience. Il renvoya un faible signal à son interlocuteur. Celui-ci s’inquiéta et lui demanda.
- Ça va ?
- Je ne sais pas. Je suis sonné.
- Il nous faut sortir de là car la pièce ne va pas tarder à se remplir d’eau. Nous sommes dans une zone marécageuse.
- Quoi ? réagit vivement Eliad, miraculeusement remis.
Mais comment sortir lorsque l’on a au-dessus de soi, un énorme tas de gravats et d’objets de toutes sortes. Ils prirent progressivement conscience qu’ils étaient enterrés vivants. Ils commencèrent par faire le bilan de leur propre état. Ils souffraient de multiples contusions mais semblaient, jusque-là, s’en être sortis à bon compte.
Un énorme bloc de béton reposait maintenant sur le lit à demi écrasé qui les avait protégés, tandis que l’eau recouvrait déjà le sol sur lequel ils étaient allongés. Il leur fallait donc coûte que coûte s’arracher de leur trou. Pendant de longues minutes, ils se contorsionnèrent, se débattirent mais ne réussirent qu’à s’épuiser davantage. Entre-temps l’eau continuait à s’infiltrer par le sol. Elle avait atteint un niveau qui obligeait les deux rescapés à maintenir leur tête relevée pour ne pas s’étouffer. A bout d’espoir, il ne leur restait plus qu’à appeler à l’aide.
- A l’aide, à l’aide, à l’aide … s’égosillèrent-ils jusqu’à ce leur voix faiblirent puis s’éteignirent.
- C’est fini Quentin. Nous allons crever comme des rats, se lamenta Eliad, cette fois, désespéré.
Quentin lui-même ne sut quoi répondre car il ne voyait pas non plus d’issue à leur situation. Mais inconsciemment son formidable instinct de survie travaillait et au bout d’un instant, il s’écria :
- Eliad ! Eliad ! J’ai une idée.
- Quoi ? réagit mollement le jeune homme.
- Ecoute-moi bien ! Il nous faut atteindre le coin de la pièce, là où la paroi en béton s’est affaissée, dégageant suffisamment de terre pour nous laisser passer. Il nous faut trouver en même temps un objet pour creuser. Un barreau de lit fera l’affaire.
- C’est quoi ton idée au juste ? demanda Eliad, vacillant entre espoir et désespoir.
- Tu as dit que nous étions faits comme des rats. Eh bien soit. Faisons comme eux ! Puisque nous ne pourrons jamais sortir par le haut, échappons-nous par le sol meuble, certainement facile à travailler.
Deuxième partie
Révélation
Le contexte
Taali, a atteint le grand âge et il a pris du recul par rapport aux débats qui traverse la société guadeloupéenne. Mais le devenir de son pays l’inquiète toujours autant. A l’approche d’un ouragan, il se retire pour méditer et il bascule dans un songe qui l’entraîne mystérieusement plusieurs siècles dans le futur, à l’antre de Kôlbo où les habitants après un désastre planétaire sont obligés de vivre sous terre pour survivre.
L’histoire
Taali est le véritable héros de cette trilogie. On a vu que les blessures de la vie l’ont forcé très jeune à se lancer dans une quête de sens et d’identité. Avançant sur ces deux rails, au soir de sa vie, il a atteint la sagesse. Le voici à plusieurs siècles de son temps dans une communauté de Kòlbo, obligé de vivre sous terre dans une société très organisée et scrupuleusement respectueuse de la vie pour survivre à une catastrophe planétaire survenue dans leur passé, c’est-à-dire à une époque correspondant à l’avenir du vieil homme. En tant qu’homme du passé, il est accusé et jugé responsable du sort de ses lointains descendants. Il ne cherche pas à se défendre mais au contraire plaide coupable. La sentence est prononcée par la vie elle-même.
A plus de quatre-vingt ans, cette expérience vécue en songe va bouleverser le patriarche et le décider, malgré son grand âge à s’impliquer, une nouvelle fois dans le combat pour le devenir.
Extrait
La voix de Douhala, crevant le silence installé, résonna dans la pièce transformée en prétoire et son écho rebondit plusieurs fois dans la tête de l’accusé.
- Nous avons besoin de savoir pourquoi l’homme du futur doit vivre cette éternelle purification, car il est évident que la Terre ne s’en remettra pas de sitôt et qu’il faudra beaucoup de générations avant de pouvoir vivre à nouveau dans un paradis. Il est d’ailleurs possible que l’homme finisse par disparaître avant.
Taali comprit qu’il lui fallait trouver quelque chose à dire à ces hommes qui voyaient dans sa venue mystérieuse une rencontre nécessaire dont le secret appartenait à la vie. Après un temps de réflexion, il commença timidement pour finir par prendre de l’assurance.
- A toutes les époques, des voix discordantes se sont élevées pour tenter de redresser la trajectoire de l’humanité lorsque celle-ci déviait de sa route. Beaucoup ont perdu leur vie parce qu’ils étaient devenus trop gênants.
Dans mon temps, des voix telle que la mienne s’élevèrent aussi pour dénoncer la consommation à outrance et la pollution de la nature. Mais ces appels furent étouffés par le bourdonnement de la masse.
Avec le recul des siècles, je regrette de n’avoir pas crié plus fort. Peut-être que quelqu’un aurait fini par relayer mon appel, et ainsi de suite jusqu’à ce que son écho amplifié par des millions de voix fasse le tour du monde et échoue dans quelque instance de pouvoir.
Il se tut un instant puis, comme personne n’intervenait, il poursuivit.
- Nous avons été capables du pire mais nous avons été aussi capables du meilleur. Certaines de nos créations s’inscrivaient parfaitement dans le processus d’évolution de la vie. Les arts tels que la musique, la poésie, la peinture, la gymnastique et … tant d’autres … témoignent d’une dimension spirituelle qui nous a élevés au-dessus du monde animal …
L’amour ! Le vrai ! Je ne parle pas de ce sentiment qui est juste une extension de son ego à l’autre et dont tout être est capable. Je parle de ce sentiment symbolisé par le sacrifice extrême du Christ et qui trouve tout son sens dans cette déclaration. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour les autres ». Renoncer à soi pour autrui. Oui, nous avons été capables de ça aussi.
Certes, nous avons peint. Nous avons chanté. Nous avons écrit. Mais nous n’avons fait que célébrer le passé. Nous avons aussi aimé. Mais là encore, nous avons chéri le présent.
Avec le recul des siècles, je regrette de ne pas avoir été l’artiste du futur. Je vous aurais alors aimés jusqu’à donner ma propre vie pour vous.
Troisième partie
La nouvelle terre
Le contexte
La Guadeloupe ne pouvant plus compter sur la France est obligée dans l’urgence de prendre des dispositions pour enfin s’assumer. Taali revenu de son rêve et encore bouleversé par cette expérience, tel un patriarche, va à nouveau guider la communauté de Kòlbo, et à travers elle, inspirer à son pays une nouvelle société basée sur des principes de solidarité et d’écologie.
L’histoire
Après une série de bouleversements environnementaux et sociaux, Taali va reprendre les commandes de la petite communauté par l’intermédiaire de l’association du quartier qui a survécu aux évènements de ces dernières années. Il est épaulé par les jeunes qui se sont installés chez lui dont son petit-fils Eliad et son ami Quentin. Dans un contexte de crise où il n’est plus possible de compter sur l’Europe, elle-même en déclin, Kòlbo va se relever et petit à petit se prendre en main. La réussite de la petite localité va inspirer les décideurs mais en même temps déclencher une lutte pour le pouvoir dans la commune, obligeant Taali à s’engager par fils spirituel interposé. Son nouveau protégé, un jeune politicien débarrassé des complexes du passé va mettre en œuvre les idées du vieil homme et tracer enfin un avenir politique pour le petit territoire.
Extrait
Enfin vint le moment crucial de soumettre au vote cette question capitale de l’avenir du petit territoire, dont tous avaient bien conscience que cette fois, ils étaient dos au mur. A la veille du scrutin, Sigal Vayan prit la parole pour exposer sa vision de collectivité solidaire et écologique. Après un long développement qui se prolongea tard dans la nuit, il conclut son intervention par ces mots :
- L’homme, à l’égard de la terre, a agi comme un cancer qui s’est généralisé et qui est en train d’envahir tout le corps avant de provoquer, sans doute, la mort de celui-ci. Notre pays ne peut évidemment pas échapper à cette logique d’autodestruction, mais nous pouvons en retarder les effets. Notre petite taille constitue, pour le coup, un avantage et l’occasion est unique. Chers collègues frères élus, nous avons le choix là, en cet instant solennel, de maintenir un système dépassé et de disparaître avec lui. Un système qui, après avoir exploité notre petit bout de terre et abêti notre peuple, les a abandonnés dans les décombres d’un monde agonisant. Mais nous avons aussi l’occasion, le devoir même, de sauver encore ce qui peut l’être. Pour cela il nous faut rompre définitivement avec le passé en quittant nos confortables sièges pour aller aider notre peuple à sortir du désert dans lequel il erre depuis plus de dix fois quarante ans. Un homme sage m’avait dit un jour « ce n’est pas d’hommes politiques que le peuple a besoin mais de guides ». Je vous le dis à vous aussi en vous invitant à venir voir ce qu’une communauté d’hommes et de femmes de diverses origines a mis en place dans cette petite localité de Kòlbo et qui, selon moi, peut nous inspirer un type de société pour notre pays. Je vous remercie chers collègues pour votre patiente et constante attention.
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Ce qui me frappe et m’inquiète, c’est la vision future de cette îe partagée en communaités qui « vivent les unes à côté des autres » dans ce futur que tu as imaginé, comme si nous avions été incapables, en notre présent, d’enrayer ces luttes intestines consécutives, je pense, à une approche erronée de notre questionnement iidentitaire.
Ton désarroi, comme le mien, rejette dans un monde fictif, loin de notre temps historique, les réflexes et les discours de la bonne volonté et de la lucidité ( ton héros), le présent dressant un mur de surdité à cet appel. J’espère que nous trouverons le temps d’en parler cette semaine au salon.
Bien cordialement
Julienne